Nue Propriété & coopérative d'habitation
Qu'est-ce qu'une coopérative d'habitation ?
Se regrouper pour contrôler et améliorer leurs conditions de logement et leurs milieux de vie, voilà la motivation fondamentale qui a amené plus de 50 000 personnes au Québec à vivre en coopérative.
Il existe près de 1 200 coopératives d'habitation où vivent quelque 23 000 ménages, un peu partout au Québec. Plus de la moitié de ces coopératives se sont regroupées en sept fédérations régionales, qui se sont à leur tour réunies au sein de la Confédération québécoise des coopératives d'habitation.
Une coopérative d'habitation, c'est un immeuble ordinaire (ou un ensemble d'immeubles), petit ou grand, neuf ou âgé - mais toujours rénové -, où habitent des personnes qui sont à la fois locataires de leur logement et collectivement propriétaires de l'immeuble.
En général, cette nue-propriété n'implique pas un investissement monétaire énorme. Le montant des parts sociales exigées du membre lorsqu'il joint les rangs de la coopérative totalise dans la plupart des cas moins de 1 000 $. Certaines coopératives émettent en plus des parts privilégiées, dont les valeurs diffèrent d'une coopérative à l'autre.
Comme propriétaires collectifs, les membres, c'est-à-dire les résidants de l'immeuble, assument ensemble la gestion complète et autonome de leur édifice et de la coopérative elle-même.
Cette gestion collective se concrétise par une participation démocratique aux assemblées, de même que par une contribution active aux différents comités nécessaires à la bonne marche de la coopérative. Chacun des membres exerce ainsi un contrôle sur la qualité de son milieu de vie.
Et puisque tout le monde participe à la gestion et à l'entretien de l'immeuble, il en résulte des coûts d'opération moindres pour la coopérative. Celle-ci est donc normalement en mesure d'offrir des loyers moins chers que les prix du marché. Cette implication de chacun est d'ailleurs explicitement reconnue par plusieurs coopératives. Ainsi, dans le cadre du contrat conclu avec chacun des membres, ceux-ci peuvent bénéficier d'une réduction du loyer normalement payable en vertu du bail, et cela en contrepartie de leur participation au sein de l'entreprise coopérative. C'est ce qu'on appelle communément le «rabais de membre».
Coopérative d’habitation, HLM, OSBL, condominium : à ne pas confondre
La coopérative d’habitation se distingue du HLM public (habitation à loyer modique), lequel est la propriété de la SHQ (Société d’habitation du Québec) ou encore d’un office municipal d'habitation. Ces logements sont financés par le biais de subventions au déficit d'exploitation.
L’OSBL d’habitation (organisme sans but lucratif), pour sa part, est une corporation au sens de la partie 3 de la Loi sur les compagnies du Québec (LRQ, chapitre C-38). Ces organismes sont gérés par des intervenants locaux et les personnes qui y vivent.
Enfin, il y a également une distinction à faire avec le condominium, où chaque occupant est personnellement propriétaire de son logement, qu'il achète et qu'il peut vendre avec profit.
Les avantages de la coopérative d'habitation :
- logement de qualité;
- bon prix;
- sécurité d'occupation à long terme;
- prise en charge de son milieu de vie;
- participation à la gestion de la coopérative;
- milieu de vie sécuritaire.
Des petites et des grosses
Il existe de très petites coopératives d'habitation, avec une dizaine de logements à peine. Il y en a aussi de très grosses qui comptent plus de 200 logements, parfois répartis dans plusieurs immeubles. À Sherbrooke, la Coopérative des Cantons de l'Est regroupe 217 logements dans 40 immeubles à travers toute la ville.
Avec ou sans vocation
Certaines coopératives ont été créées pour des clientèles spécifiques : personnes âgées, familles monoparentales, immigrants, etc. La plupart n'ont cependant aucune vocation particulière. Plusieurs disposent de quelques appartements aménagés pour des personnes handicapées.
Un cadre légal spécifique
Comme pour plusieurs autres secteurs d'activité (agricole, funéraire, alimentation, etc.), les coopératives d'habitation sont d'abord régies par la Loi sur les coopératives, qui détermine, entre autres, les règles juridiques relatives à la constitution, au financement et au fonctionnement associatif des coopératives. La Loi sur les coopératives comporte également des dispositions applicables spécifiquement aux coopératives d'habitation.
En tant que propriétaires d'immeubles à logements et, pour la plupart, en tant que gestionnaires de fonds publics, les coopératives d'habitation doivent également respecter différentes autres lois, règlements et accords avec les organismes subventionneurs.
Comment fonctionne une coopérative d'habitation ?
L'assemblée générale
La base de la coopérative, c'est l'assemblée des membres - ou si l'on veut, l'assemblée générale - qui est constituée de l'ensemble des membres. Contrairement à une compagnie, chaque membre dispose d'un droit de vote égal à l'assemblée des membres. Celle-ci se réunit au moins une fois par année afin de tenir l'assemblée générale annuelle, laquelle doit se tenir dans les quatre mois suivant la fin de l'exercice financier de la coopérative. Lors de l'assemblée générale annuelle, les membres doivent, notamment :
- prendre connaissance du rapport du vérificateur et du rapport annuel;
- statuer sur la répartition des trop-perçus ou excédents;
- élire les administrateurs;
- nommer le vérificateur.
La coopérative peut également tenir des assemblées extraordinaires pour débattre et décider de toutes questions relevant de la compétence de l'assemblée.
Notons que l'assemblée des membres a le pouvoir exclusif d'adopter et de modifier les règlements de la coopérative.
Le conseil d'administration
Le conseil d'administration, qui est composé d'au moins 5 et d'au plus 15 administrateurs, occupe une place centrale dans le fonctionnement coopératif. Il voit à la bonne marche des affaires de la coopérative. Par exemple, c'est en général le conseil d'administration qui embauche le personnel, approuve les contrats avec les fournisseurs, désigne les personnes autorisées à signer au nom de la coopérative, prend les décisions relatives aux finances et voit au respect des règlements et politiques de la coopérative.
C'est également le conseil d'administration qui admet les nouveaux membres et, parfois malheureusement, décide de suspendre ou d'exclure ceux-ci.
Le conseil d'adminstration est en principe composé de membres de la coopérative. La coopérative peut cependant adopter un règlement rendant éligibles d'autres personnes, celles-ci ne devant toutefois pas représenter plus de 25% des administrateurs au conseil.
Aucun membre du conseil ne peut être rémunéré pour le travail qu'il accomplit comme administrateur.
Notons qu'il est possible pour une coopérative comptant moins de 25 membres de ne pas élire de conseil d'administration. Toutefois, il s'agit là d'une exception et certaines conditions doivent être respectées. D'abord, la convention des membres doit être écrite et obtenir le consentement d'au moins 90% des membres; une copie de la convention doit par la suite être transmise au ministère du Développement économique et régional du Québec. Ce sont alors les membres qui administrent la coopérative comme s'ils en étaient les administrateurs.
Les comités
Pour effectuer les différentes tâches inhérentes au bon fonctionnement de la coopérative, on forme généralement des comités, auxquels participent les membres selon leurs intérêts et leurs compétences. Cette pratique permet de répartir le travail entre l'ensemble des résidants, évitant d'en faire porter trop lourd à seulement quelques-uns. La participation aux comités fortifie en outre l'esprit communautaire des membres.
Les comités les plus fréquents sont ceux des finances, de l'entretien et de la sélection des nouveaux membres. Idéalement, les coopératives ont aussi un comité de formation. Ce comité est très utile, entre autres, pour assurer qu'il y ait toujours des membres en mesure de prendre la relève dans les tâches de gestion et d'entretien. C'est également par ce comité que se fait l'éducation aux principes et aux valeurs de la coopération. Plusieurs coopératives ont aussi des comités de secrétariat, de loisir, d'environnement, de bon voisinage, etc.
Ce qui est dommage, quand quelqu'un ne fait pas sa part, c'est que le travail retombe sur les épaules des autres. Danielle Gratton, coopérative L'Horizon, Baie-Comeau.
Les outils
Pour fonctionner de façon efficace, les coopératives se dotent de plusieurs outils : règlements, politiques et procédures, plan de gestion, plan d'entretien, contrat de membre, cahier de membre, etc.
Si elles ne sont pas en mesure de se donner elles-mêmes ces outils, les coopératives peuvent obtenir le soutien de la fédération dont elles sont membres ou de la CQCH. Elles peuvent d'ailleurs obtenir une multitude d'autres services auprès de leur fédération, notamment des services de formation, de même que certains outils développés par le mouvement :
- Guide pratique de gestion des coopératives d'habitation (Confédération québécoise des coopératives d'habitation);
- Gestion du logement social : règlements, normes et directives (Société d'habitation du Québec);
- Guide d'entretien préventif (Confédération québécoise des coopératives d'habitation).
Le Mouvement de l'habitation coopérative
Le Mouvement de l'habitation coopérative c'est :
- 50 000 résidants;
- 23 000 logements;
- près de 1 200 coopératives d'habitation;
- sept fédérations régionales;
- une Confédération;
- un actif immobilier de près de 1 milliard $;
- un chiffre d'affaire annuel de l'ordre de 140 millions $.
Ce sont les membres de chacune des coopératives d'habitation, c'est-à-dire les personnes vivant dans les coopératives, qui constituent la base du Mouvement.
L'administration et la gestion du parc coopératif québécois en habitation reposent presque exclusivement sur l'implication volontaire et bénévole des membres résidants. Cette réalité a largement façonné la structure du réseau.
En se regroupant dans une coopérative, ces personnes se donnent une force collective pour prendre en main leurs conditions d'habitation. Elles profitent ainsi d'un bon logement à prix abordable, dans un milieu de vie intéressant, avec une sécurité d'occupation à long terme. Et surtout, elles participent démocratiquement à la gestion de l'immeuble dont elles sont collectivement propriétaires par l'intermédiaire de la coopérative.
Plusieurs de ces coopératives se donnent à leur tour une force commune au sein de fédérations régionales. Et les fédérations se regroupent en une confédération qui constitue le porte-parole du Mouvement dans l'ensemble du Québec.
La Confédération au sein du Mouvement coopératif dans son ensemble
La Confédération québécoise des coopératives d’habitation est le maître d’œuvre du Mouvement coopératif en habitation au Québec. Mais au-delà du domaine de l’habitation, la Confédération adhère à un ensemble plus large qui regroupe tous les secteurs d’activité de la coopération. La Confédération est notamment membre d’organismes ou institutions qui oeuvrent dans le domaine de la coopération comme le Conseil de la coopération du Québec (CCQ), le Conseil canadien de la coopération (CCC), la Fédération de l’habitation coopérative du Canada (FHCC). En outre, la CQCH établit des partenariats avec des institutions coopératives financières telles Desjardins et elle est solidaire d’organisations qui travaillent à l’échelle mondiale comme Abri International.
Historique
La naissance du Mouvement
C'est dans les années 70 que les premières coopératives d'habitation à propriété collective, sans but lucratif et entièrement gérées par leurs membres, telles qu'on les connaît aujourd'hui, ont vu le jour au Québec.
C'était l'âge d'or du « peace and love », mais aussi celui du développement urbain tout azimut, qui aggravait les problèmes de logement des moins nantis, dans les villes.
C'était également l'époque du militantisme, où revendications et manifestations se tramaient à tous les coins de rues. Pendant que les bulldozers démolissaient des maisons pour construire autoroutes urbaines et tours de béton, des groupes de citoyens mécontents protestaient jusque dans les bureaux des maires et des développeurs.
Parmi leurs revendications : de l'aide gouvernementale pour démarrer des coopératives d'habitation. On voulait acheter et rénover des vieilles bâtisses et en construire des nouvelles. Certaines luttes épiques ont ainsi contribué à sauver des dizaines d'immeubles et ont conduit à la création de plusieurs coopératives d'habitation.
Les premières coopératives sont apparues dans les régions de Sherbrooke, Québec, Montréal et Hull. Puis, à la faveur des programmes d'aide mis sur pied par le gouvernement fédéral, en 1973, et par Québec, en 1977, et grâce à l'appui de groupes de ressources techniques, la formule coopérative en habitation s'est répandue dans tout le Québec.
À mesure que le Mouvement prenait de l'ampleur, les coopératives ont senti le besoin de se regrouper pour se donner des services, une force de représentation et un lieu de concertation. C'est ainsi que sont nées les fédérations régionales, à partir de 1979. En 1987, les fédérations ont à leur tour choisi de s'unir en créant la Confédération québécoise des coopératives d'habitation.
Ce Mouvement est aujourd'hui bien enraciné dans l'ensemble des régions du Québec. La formule coopérative en habitation s'avère la voie d'avenir la plus prometteuse pour combler les besoins de logement de plus en plus de personnes, de différents horizons culturels et de diverses catégories de revenus, favorisant ainsi une mixité, une solidarité et une plus grande cohésion sociale dans leur milieu.
Quelques événements à retenir
1941 - Création des premières coopératives d'habitation québécoises, dans la ville minière d'Asbestos, en Estrie. Il s'agissait en fait de coopératives de construction qui permettaient à leurs membres d'accéder à la propriété privée de maisons unifamiliales, une fois celles-ci construites en corvée (chaque membre participe bénévolement à la construction de la maison).
1964 - Recommandation par le Conseil de la coopération du Québec de développer, à l'intention des familles à faibles revenus, des logements coopératifs dont la propriété serait collective et dont les membres seraient locataires de leur logement.
1968 - Mise sur pied du Comité de citoyens de Milton-Parc, un groupe de locataires et de militants opposés à la démolition de tout un quartier de maisons à Montréal. L'action du Comité se soldera, 10 ans plus tard, par la création de l'un des plus importants parcs de coopératives d'habitation au Canada.
1968 - Naissance de la Fondation de l'habitation coopérative du Canada, qui deviendra plus tard la Fédération de l'habitation coopérative du Canada, l'actuelle FHCC.
1969 - Mise sur pied de la Fédération Co-op Habitat, un organisme financé par le gouvernement du Québec pour créer des logements coopératifs à l'intention d'une clientèle à faibles revenus. Dirigée d'en haut par une panoplie d'experts, l'entreprise s'avère un échec et est interrompue 18 mois après sa mise en branle.
1973 - Adoption du premier programme fédéral d'aide à la création de coopératives d'habitation, le 34,18. La nouveauté de ce programme est qu'il vise à développer de petits ensembles locatifs qui seront gérés par les membres à la base.
1975 - Création du Mouvement Saint-Gabriel, un groupe de locataires qui, pendant trois ans, se battra avec acharnement pour rénover et transformer en coopératives d'habitation 17 maisons vouées à la démolition dans le Vieux-Québec.
1976 - Colloque organisé par le Conseil de la coopération du Québec pour relancer l'habitation coopérative à la suite du vide laissé par l'échec de Co-op habitat, six ans plus tôt.
1977 - Lancement de Logipop, le premier programme provincial de financement de coopératives d'habitation. Ce programme finance également la mise sur pied de groupes de ressources techniques (les GRT) qui prêtent assistance au démarrage de coopératives d'habitation.
1977 - Adoption du Manifeste des coopératives d'habitation par l'ensemble des coopératives du Québec.
1979 - Après deux ans d'efforts, échec de la création d'une Fédération des associations coopératives du Québec. On s'appliquera plutôt désormais à créer des regroupements régionaux.
1979 - Naissance de la première fédération régionale de coopératives d'habitation, à Sherbrooke dans les Cantons-de-l'Est. Sept autres verront le jour par la suite.
1985 - Regroupement des fédérations régionales au sein du conseil québécois de l'habitation populaire, dont l'un des mandats est la mise sur pied d'une confédération provinciale.
1987 - Naissance de la Confédération québécoise des coopératives d'habitation, l'actuelle CQCH, qui regroupe alors cinq fédérations régionales.
1992 - Après trois programmes consécutifs, retrait du gouvernement fédéral dans le financement de nouvelles coopératives d'habitation.
1997 - Lancement de l'actuel AccèsLogis, le quatrième programme provincial de financement de coopératives d'habitation depuis Logipop.
1997 - Congrès conjoint de la CQCH et de la FHCC tenu à Montréal, où l’ensemble des coopératives d’habitation du Québec ont été invitéES.
2001 - La structure associative de la CQCH est modifiée de manière à donner le contrôle exclusif du Mouvement aux membres des coopératives.
2001 - Processus amorcé par le gouvernement du Québec devant mener à l’adoption d’une politique de développement des coopératives. Celle-ci donnera au mouvement coopératif en habitation les moyens permettant le développement de nouvelles coopératives et la consolidation des anciennes.
2002 - Lancement du programme d’aide financière Logement abordable Québec, conçu pour la construction de logements à loyers abordables.
Le mouvement en constante évolution
Le Mouvement assure la représentativité des coopératives en habitation et il est doté d'instances à structure démocratique. Cela justifie la tâche de maître d'oeuvre de l'habitation coopérative qu'assume la CQCH et ses fédérations membres. Cet ouvrage se fait autant en matière de développement d'intervention, qu'en matière de consolidation du réseau coopératif.
La CQCH s'est dotée d'un plan de développement de logements coopératifs pour les années 2002 à 2006. Ce plan vise le développpement de 5 000 logements coopératifs sur 5 ans, dont la majorité au cours des seules années 2003 et 2004.
Notre plan de développement comporte plusieurs moyens concrets pour atteindre nos objectifs, dont la mise en valeur de concepts novateurs visant à actualiser la formule coopérative en habitation pour lui permettre de mieux répondre aux besoins changeants des individus et des familles québécoises.
En résumé, le Mouvement coopératif en habitation a joué au cours des 25 dernières années un rôle de premier plan dans l'amélioration des conditions de logement au Québec. Afin de s'adapter aux réalités actuelles, le Mouvement n'entend pas seulement revendiquer la maîtrise d'oeuvre de l'habitation coopérative, mais appuie par des mesures et des investissements concrets l'affirmation de son leadership.
Manifeste des coopératives
En 1977, des membres de coopératives d'habitation de tout le Québec ont adopté un manifeste pour assurer le développement du genre de coopératives auxquelles ils croyaient.
Les coopératives d'habitation existantes à ce moment étaient toutes sans but lucratif, et les militants qui les avaient fondées tenaient pour premier principe qu'une coopérative soit gérée par ses membres, à la base, et qu'elle demeure la propriété collective de ses membres. Pour ces militants de la première heure, c'était la meilleure façon de garantir le droit à un logement décent et une prise en main de leurs conditions d'habitation, même pour les plus démunis de la société.
C'est sur cette base qu'a été élaboré le projet de manifeste. À partir d'un texte qui a circulé pendant quelques mois dans les coopératives, le projet a été adopté en mars 1977, lors d'une réunion de toutes les coopératives de la province, tenue au Cégep de Sherbrooke . Pendant deux journées, les délégués d'une cinquantaine de coopératives en ont débattu le texte, phrase par phrase, mot par mot, jusqu'à l'adoption du Manifeste qui, 23 ans plus tard, sert toujours de credo au Mouvement coopératif en habitation du Québec. En voici le libellé :
Le but du manifeste est d'énoncer des valeurs et des principes de base communs aux coopératives d'habitation, qui serviront de référence à toute action relative au mouvement coopératif en habitation.
- Une saine politique d'habitation doit reconnaître le droit de tous au logement et appliquer ce droit dans les faits pour satisfaire les besoins de tous en matière d'habitation plutôt qu'à favoriser le profit pour quelques personnes.
- Pour répondre aux besoins des gens en matière de logement et favoriser des rapports humains et sociaux égalitaires tout en favorisant la prise en charge par chaque individu de son droit de se loger convenablement, nous préconisons le développement d'un authentique mouvement de coopération dans le secteur de l'habitation.
- Un mouvement coopératif doit permettre à tous d'avoir d'avoir accès à un logement convenable, à un coût convenable. Un mouvement coopératif en habitation doit toujours reposer sur l'initiative des membres eux-mêmes, respecter et favoriser la participation active et le contrôle par les membres des projets particuliers et du mouvement dans son ensemble. Une habitation coopérative doit constituer et demeurer une propriété collective, qui ne cherche pas l'accumulation individuelle de capital, mais plutôt l'accumulation d'un capital collectif.
- Le mouvement coopératif en habitation doit éduquer et former ses membres, et élargir leurs horizons aux autres dimensions et problèmes de leur quartier et de la société.
- La coopération dans le domaine de l'habitation n'a de sens et d'avenir que si les divers projets s'unissent aux niveaux régional et national, afin de permettre des échanges enrichissants entre les coopératives et de promouvoir et défendre les principes garantissant le développement harmonieux et authentiquement coopératif du mouvement.
Nos valeurs et principes
Des valeurs
Les valeurs fondamentales des coopératives sont la prise en charge et la responsabilité personnelles et mutuelles, la démocratie, l’égalité, l’équité et la solidarité. Fidèles à l’esprit des fondateurs, les membres de coopératives adhèrent à une éthique fondée sur l’honnêteté, la transparence, la responsabilité sociale et l’altruisme.
Les valeurs fondamentales de la coopération sont celles que défendaient déjà les fondateurs du mouvement coopératif au XIXe siècle, mais qui ont été reformulées en 1995 par l’Alliance coopérative internationale (ACI). La reformulation de ces valeurs et principes faisait partie de la nouvelle Déclaration sur l’identité coopérative adoptée par l’ACI, à l’occasion de son congrès de 100e anniversaire. Il s’agissait de resituer dans le contexte du XXIe siècle les fondements sur lesquels repose la coopération. Cette remise à jour de la Déclaration était la troisième depuis le début du siècle.
Le mouvement coopératif a beaucoup évolué au cours de ses 100 ans d’existence. Il s’est notamment ramifié dans tous les secteurs de la vie sociale et économique et a gagné toutes les parties du monde, rejoignant des sociétés aux cultures et aux croyances les plus diverses. S’il s’est adapté à toute cette diversité, c’est qu’au-delà des différences, il a toujours maintenu et défendu les valeurs qui lui ont donné naissance ; ces valeurs qui sont, en fait, à la base de toute entraide réelle et efficace entre les êtres humains. La prise en charge de soi, la responsabilité, la démocratie, l’égalité et l’équité s’appliquent toujours au monde de la coopération en cette fin de millénaire. De fait, elles s’avèrent plus essentielles que jamais, dans un contexte de néo-libéralisme et de mondialisation où la toute-puissante économie n’a que faire des considérations humaines ou sociales.
Et des principes
Pour mettre en pratique les valeurs de base du mouvement coopératif, les coopératives suivent un certain nombre de lignes directrices qui ont été formulées sous forme de principes, par l'Alliance coopérative internationale, en 1995.
- Adhésion volontaire et ouverte à tous
- Pouvoir démocratique exercé par les membres
- Participation économique des membres
- Autonomie et indépendance
- Éducation, formation et information
- Coopération entre les coopératives
- Engagement envers la communauté
Guide pratique de gestion des coopératives d'habitation
La Confédération québécoise des coopératives d'habitation (CQCH) reconnaît qu'il n'est pas toujours facile pour les membres des coopératives, élus à des postes de direction ou en charge de responsabilités spécifiques, de gérer leur coopérative tout en respectant les valeurs et les principes coopératifs.
C'est dans l'optique d'éclairer les membres et les administrateurs des coopératives d'habitation que la CQCH publie, en collaboration avec les fédérations régionales, un Guide pratique de gestion.
Le Guide se veut un outil pratique, facile à consulter et à mettre à jour. Chaque sujet est donc présenté dans un fascicule indépendant des autres. Nous avons voulu formuler dans un langage clair les principaux renseignements dont vous avez besoin pour ajuster votre fonctionnement, vos méthodes de travail et votre processus de décision afin de remplir le plus adéquatement possible la mission de votre coopérative.
Chacun des fascicules indique les références aux lois en vigueur et les rappels et renvois à des explications plus élaborées dans d'autres fascicules. La mise à jour des informations contenues dans le Guide sera faite par la CQCH.
C'est riche de l'expérience accumulée par les coopératives en place que la CQCH peut vous présenter ce Guide pratique de gestion. Nous sommes convaincus qu'il pourra répondre à nombre de questions que vous vous posez.
Pour se procurer le guide, les coopératives d'habitation membres peuvent s'adresser à leur fédération régionale.
Un mouvement reconnu
Habitation coopérative
La formule coopérative en habitation est largement reconnue comme l'un des meilleurs véhicules du logement communautaire au Québec. Plusieurs organismes oeuvrant dans le domaine social et dans celui de l'habitation ont publiquement manifesté leur appui au mouvement de l'habitation coopérative et à son développement.
Des études indiquent que les personnes y développent (dans les coopératives d'habitation) un sentiment d'appartenance plus solide, des relations de voisinage plus amicales, y trouvent des modèles parentaux plus variés, apprécient davantage le quartier
où elles sont installées.
Ministère de la Santé et des Services sociaux, Rapport du groupe de travail pour les jeunes, «Un Québec fou de ses enfants», 1991.
La clientèle des coopératives est davantage diversifiée que celle des HLM en termes de niveaux de revenus, ce qui contribue à assurer une certaine forme de mixité sociale.
Conseil de la famille, «Agir avec les familles en habitation»,
Avis transmis à la ministre responsable de la Famille, 1991.
La formule coopérative permet une prise de contrôle de leur lieu de vie par les résidants, ce qui entraîne des effets importants sur l'éclatement du cercle vicieux de la dépendance.
Commission des droits de la personne et des droits
de la jeunesse, Mémoire à la Commission des affaires sociales sur la sécurité du revenu, 1997.
Dans les coopératives d'habitation, les gens à faibles revenus ont la possibilité de développer la propriété collective de leur logement. (...) Les coopératives regroupent des gens de diverses catégories de revenus, favorisant ainsi la solidarité sociale
et évitant la formation de ghettos.
Ian MacPherson, «Comment développer l'alternative coopérative», document de travail en vue des tables rondes sur le modèle coopératif pour les services publics, Université Victoria,
1997.
Mouvement québécois de l'habitation coopérative
Les coopératives d’habitation représentent le plus important groupe de coopératives au Québec, soit près de 1200 coopératives qui possèdent plus de 23 000 logements. Elles réalisent des revenus de 140 millions de dollars, en plus de rendre un service social en offrant des loyers à prix plus accessibles et de permettre la revitalisation de certains quartiers centraux de plusieurs villes.
Avec un actif de plus d'un milliard de dollars, les coopératives d’habitation gèrent un important parc de logements locatifs au Québec. On retrouve des coopératives d’habitation dans toutes les régions du Québec, mais plus particulièrement en milieu urbain.
Confédération québécoise des coopératives d'habitation
La Confédération québécoise des coopératives d’habitation (CQCH) a été créée en 1987. Elle regroupe sept fédérations régionales qui elles-mêmes regroupent au delà de 750 coopératives d’habitation membres comprenant près de 15 000 unités de logements dans la plupart des régions du Québec.
La CQCH est le maître d’oeuvre et l’agent de promotion du Mouvement coopératif en habitation au Québec. Son rôle principal est d’appuyer les fédérations afin qu’elle fournissent aux membres des coopératives l’information et les services dont ils ont besoin pour assurer une saine gestion de leurs immeubles et améliorer leurs conditions de logement.
À ce titre, elle :
- agit comme porte-parole du mouvement;
- représente les coopératives d’habitation et leurs fédérations régionales;
- regroupe et assure la concertation des fédérations régionales des coopératives d'habitation;
- défend les intérêts des coopératives d’habitation et de leurs fédérations régionales;
- assure la promotion et le développement des différentes formules coopératives en habitation;
- offre des services d’information et de formation aux fédérations régionales, aux coopératives et à leurs membres;
- développe des groupes d’achats avantageux pour les fédérations, les coopératives et les individus membres des coopératives;
- favorise, suscite et alimente la réflexion sur l’état et sur tout enjeu pouvant confronter le mouvement;
- élabore, met en place et évalue les meilleures stratégies de fonctionnement et de développement de l’habitation coopérative;
- assure au sein du mouvement le respect des valeurs et des principes acceptés par le mouvement ainsi que le respect de règles d’action et de conduite relevant de la plus haute éthique;
- s’engage dans toute activité décidée par et pour l’ensemble du mouvement.